Belle arrière-grand-mère by Boissard Janine

Belle arrière-grand-mère by Boissard Janine

Auteur:Boissard,Janine [Boissard,Janine]
La langue: eng
Format: epub
Tags: Roman
Éditeur: Fayard
Publié: 2014-04-25T22:00:00+00:00


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Les hommes en noir se sont glissés dès huit heures dans la maison pour la mise en bière. Blanche les guettait afin qu’ils n’aient pas à sonner. On aurait dit une bande d’espions dans un film improbable. Ils étaient conduits par une petite femme en tailleur gris d’une quarantaine d’années, au visage doux et ferme : « La maîtresse de cérémonie de l’entreprise », s’est-elle présentée. Son rôle serait de ne pas ajouter le désordre à la douleur. Elle veillerait à ce que les différentes étapes de cette journée – de la maison à l’église, de l’église au cimetière – se passent harmonieusement, dans la dignité et le respect dus à la défunte et à sa famille. Elle m’a proposé de l’appeler par son prénom, Béatrice, comme un pacte que nous aurions scellé face à l’innommable. J’ai accepté, elle me plaisait. Ni mine apitoyée, ni « je partage votre peine », le sentiment étrange qu’elle « savait » et que nous pourrions nous appuyer sur elle. Et puis, « Béatrice », l’amie de Dante, auteur de La Divine Comédie, paradis, purgatoire, enfer, ça vous pose quand même.

Également vers huit heures, eux passant par la porte de la dépendance, Laurent Prieur et son équipe ont investi la cuisine. Une sorte de chassé-croisé, la vie, la mort, s’est instaurée dans la cour, cagettes de fruits, légumes et autres victuailles, croisant inquiétantes saccoches, lourdes serviettes, et le long et plat carton, porté à deux, qui contenait le capiton.

Les derniers soins dispensés à Fée par le thanatopracteur et son assistant prendraient un certain temps, aussi Blanche nous a-t-elle poussés dehors, Hugo et moi, promettant de nous appeler, le moment venu – quel moment ? Nous n’avons pas insisté pour rester.

D’autant que dans les escaliers les cavalcades commençaient tandis que la tuyauterie de la salle de bains et des cabinets de toilette faisait vibrer les murs et que se déversaient les insolantes cataractes des chasses d’eau.

Il fallait gérer les petits déjeuners, servis sur la terrasse d’Hugo, sorti dès l’aube chercher baguettes fraîches, croissants et pains au chocolat à la boulangerie. Café ? Thé ? Cacao ? Brrr, frisquet, le ciel, malgré le soleil annoncé. Et on ne s’incruste pas, s’il vous plaît, les suivants attendent.

Dans leur chambre, saint Jean-Eudes et Audrey préparaient avec les volontaires les interventions durant la messe. Un peu partout fusait la lumière des portables ou tablettes, promis, ils seraient mis hors circuit dès le seuil de la maison franchi. Mes Grâces m’auraient-elles appelée si je n’avais pas oublié le mien à La Maison ? Et où en étaient-elles à leur hôtel du Parc ? Petit déjeuner dans la chambre ou au buffet, très réputé, dans la salle à manger où les clients, pas idiots, s’empiffraient pour la journée ?

De la cuisine du Cigalou, des odeurs de toutes les couleurs de la gourmandise commençaient à monter, que les cuisiniers tentaient de dissiper en créant des courants d’air qui ne faisaient qu’aggraver les choses. Touchant de bonne volonté, soucieux de me faire savoir qu’il était là, Grégoire l’était trop, ne me lâchant pas.



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